Pierre-Adrien Roux, Presse-Océan, janvier 2014
Épuré, intimiste. Le deuxième disque de Sylain GirO, Les camélias de Nantes, est une perle rare dans la chanson française. Il n’y a pas grand chose… Une voix et un violoncelle. Mais en même temps, il y a beaucoup. Connu en tant que leader du groupe de musique bretonne Katé-mé entre 1999 et 2009, Sylvain Girault a troqué quelques lettres de son patronyme pour entamer en 2011 une aventure plus perso. Après Le batteur de grève, c’est avec un six titres en duo que nous revient celui qui est aussi directeur du Nouveau pavillon de Bouguenais. Les camélias de Nantes brille par sa simplicité apparente. Deux lignes de crêtes se suivent, se chevauchent, s’entremêlent parfaitement : la voix syncopée de Sylvain GirO, et l’intense phrasé du violoncelliste Erwan Martinerie. Sylvain GirO prend des risques comme peu d’artistes de son domaine. Sa musique est pleine de silences, ses chansons sans harmonie. On est là dans une sobriété qui peut dérouter, mais qui instaure une certaine magie. Car le résultat est une musique qui respire. L’auditeur prend le temps de laisser éclore les mots du chanteur comme des bulles de savon finissant par s’évaporer dans le sillage du violoncelle. Et puis, il y a le sens, le texte. Car Sylvain GirO n’est pas du genre à écrire pour écrire. Et là aussi, il surprend. Le chanteur aborde un répertoire réaliste avec une force poétique. GirO ne parle pas du chômage (Au delà de l’hiver), il évoque l’homme aux “mains devenues grises et inutiles”. Il ne raconte pas la maladie d’Alzheimer, mais il décrit La Dame de Maumusson “qui demande l’autorisation de reprendre sa respiration »… Avec cet album très personnel, Sylvain GirO réussit à explorer, à défricher sur le terrain des émotions. Et c’est pour lui toute la raison d’être d’un artiste.
Michel Kemper – blog Nos Enchanteurs, 17 décembre 2013
« Avec sa voix syncopée, un rythme afro-folk baigné de celte, de roots et de rock, de pop et de hip-hop, de jazz, une façon de chanter qui n’est pas sans rappeler les plus fameux folk-singer (chez nous Yacoub…), Sylvain GirO nous saisit à nouveau, mais à rebours de ce que nous attendions de lui, en une préoccupation que nous ne savions pas de lui. Là, c’est sur un sujet social, un homme devenu tout nu tout inutile, qui sous son toit se terre, qui va Au-devant de l’hiver. GirO ne parle ni de Mains d’or ni d’usine qu’a foutu l’camp à Singapour, mais le sujet est le même qui décidément travaille la chanson, celle qui jadis, justement, rythmait les gestes du travail. Comment à présent scander le vide, l’absence, le chômage, ces mains qui ne servent plus à rien ? A cette thématique dans l’air du temps GirO ajoute une pièce de choix sertie d’un bien beau talent. Voici un six titres, en public à Nantes. Frustration, cédé à moitié vide, à moitié plein. Qui nous fait simplement patienter d’un nouvel album promis pour l’automne 2014. Six chansons avec, chacune, pour des raisons différentes, leur part de nostalgie, de douce mélancolie. Leur choix de mots et cet agencement qui tient autant d’une écriture littéraire que de notes qui vont s’en emparer pour de folles épousailles. Des histoires de destriers et de mers enchaînées, d’une dame qui fait des bulles de savon, d’une autre et d’un amour dans Les camélias de Nantes, la chanson-titre menée par un violoncelle (Erwan Martinerie) se prenant pour viole de gambe. J’avais osé dire de Sylvain GirO qu’il était un des grands événements donnés à la chanson d’aujourd’hui, ou quelque chose comme ça. Je maintiens. Avec lui on joue avec des mots et des sons comme avec des balles, on est jongleur on est acrobate d’émotion. Les mots explosent en nos oreilles y délivrant toute leur histoire, leur magie. C’est d’autant plus surprenant que ça ne tient à rien ou si peu : une voix hors des chants communs, un violoncelle, une douce folie qui les anime. C’est simplement exemplaire. »
Karr Nij – Le cri de l’ormeau – octobre 2013
« Une formule épurée, voix et violoncelle (Erwan Martinerie, très inspiré entre archet et pizzicatti), c’est ce que nous propose Sylvain Giro dans ce petit six titres enregistré en public. Cette sobriété met en relief la qualité des textes signés du chanteur du pays nantais. Chaque chanson nous raconte une histoire où les mots prennent du sens, on est loin des amourettes et des bluettes servies d’ordinaire par la variété. La superbe Dame de Maumusson témoigne de cette volonté affichée depuis déjà quelques années par Sylvain Giro. Cette femme n’a manifestement plus toute sa tête mais la vie garde du souffle chez elle, avec une forme de magie. Les mots s’entrechoquent, les sonorités jouent et rejouent la petite tragédie que d’aucuns vivent dans le grand âge ou la folie. Si les textes traduisent un souci d’écriture, les mélodies, toujours signées Sylvain Giro, dénotent également une certaine sophistication que le violoncelle sait entourer de ses notes chaleureuses. »
Guy Samson, Revue de chanson française « Récré’Action », N°65, octobre 2012
« Un disque parfois étrange laissant une impression de mystère, tant par certains textes parfois sibyllins, que par l’arrangement musical remarquable des musiciens. Une belle voix simple, claire et puissante, avec des textes bien écrits à résonance poétique qui cisèlent les mots et jouent avec leur sonorité. (…) Une impression dominante de nostalgie, celle de l’enfance notamment. L’amour y est présent mais mystérieux avec l’inaccessible Clémence et « Les yeux de son choix », ou impossible (Tu ne seras jamais). A quoi il faut ajouter le magnifique Je t’écris de la main gauche de la grande Danielle Messia, ici traitée de façon rythmée et sans épanchement lyrique. Et l’union de l’amour et de la mort avec le très beau L’étang Dodelodela. Un thème proche de la fin de Tristan et Yseult. Au total un étrange amalgame d’imagination débridée et de retour constant à un réalisme parfois désespéré. Un album à écouter pour sa profonde originalité, tant dans les textes que dans l’interprétation vocale et les arrangements, où certains pourraient trouver une parenté avec Bertrand Cantat, Gérard Manset ou Gabriel Yacoub. Une parenté seulement car en son genre, Sylvain GirO est bien unique et demande sans aucun doute à être découvert sur scène. »