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Presse

Georges Fischer – Revue Tohu-Bohu, février 2015

Trois ans après le volcanique Batteur de grève, Sylvain Giro a renforcé son équipe de forgeurs de sons avec le violoncelliste Erwan Martinerie. Riche idée qui a parallèlement enfanté d’un duo entre les voix du violoncelle et du chanteur. C’est surprenant comme la convergence et les influences d’un folk breton contemporain, du rock des 70’s, voire du free-jazz, engendre une bande-son qui évoque l’héroïc fantasy. Il est vrai que le disque est la partie musicale d’un spectacle où le conte fait contrepoint à ces chansons. Ici, celles-ci l’évoquent et déploient leur dimension imaginaire, conjonction des mots et des sons. Le climat est souvent grave, parfois pesant mais toujours riche des timbres des claviers vintage, des percussions et des voix mêlées du violoncelle et du chanteur. Et puis, un moment de légèreté subtile arrive avec cette Flânerie vélocipédique dont la musique est signée par le grand Tony Hymas, compagnon de route d’une autre voix qui vient de s’éteindre, celle de l’immense Jack Bruce. Sylvain GirO rencontre ici la sublime légèreté d’un grand résistant (habilement habillée par la flûte d’Erwan Hamon) et l’on peut imaginer que les images du livret, captées par Val K à Notre Dame des Landes, belles traces d’un monde d’eau, de terres et de bois, n’y figurent pas innocemment… La tension culmine à l’évocation de cette Gare St Jean, sorte d’Orly moderne qui retrouve les accents pathétiques de la chanson de Brel avec d’autres sons et d’autres mots. Avec quelle malice, Sylvain GirO nous donne à réfléchir sur l’origine de la guerre dans la gaieté dramatique de Fais ta prière, sarcastique comme une vanité au milieu d’une danse paysanne de Brueghel ! Les promesses du premier album sont tenues ici, renforcées, illustrées par un récit à découvrir à la scène !

Revue Ar Men – Michel Toutous – Mars 2015

S’il a débuté par le chant traditionnel où il est devenu une référence, Sylvain GirO a tôt fait comprendre que cela ne lui suffisait pas. Ce qui lui a permis de développer un timbre percutant et une virtuosité vocale qui ont fait les beaux jours de Katé-Mé entre autres. Il s’est attelé depuis quelques années à l’écriture et, le moins que l’on puisse dire, c’est que cette mutation est une belle réussite. La voix est toujours là, un instrument à elle seule, avec toujours plus de nuances. Des mélodies bien troussées acheminent des textes qui ne laisseront jamais indifférents, remplis d’images fortes comme dans ce superbe Carré des indigents, où les mots subliment un endroit déserté par les fleurs et les prières. Julien Padovani et Erwan Martinerie assurent la direction musicale de l’album avec la complicité des baguettes de Jean-Marie Nivaigne. Ils savent habilement poser les sonorités et les notes sur ces chansons. Le violoncelle et l’orgue Hammond déclinent un univers à l’acoustique tantôt radicale, tantôt feutrée, mais toujours en adéquation avec le texte et la mélodie. Sylvain GirO fait son bonhomme de chemin et s’installe, mine de rien, au rang des grands chanteurs francophones, tous genres confondus.

Arnaud Roffignon – Revue ENA Hors les murs – N°444, février 2015

Il y a trois ans nous découvrions Sylvain GirO. La révélation c’était d’abord celle de sa voix, singulière, immédiate et puissante ; ensuite celle de l’auteur-compositeur, artisan et artiste de la chanson, tissant et nouant inlassablement mélodies et poèmes. Après un parcours affirmé dans le milieu des musiques populaires de tradition orale de Bretagne, le chanteur s’était lancé avec Le batteur de grève dans une nouvelle aventure, nourrie aux sources qui l’inspirent et l’imprègnent : le rock, la pop, le folk et le jazz… Ne sacrifiant jamais la musique au verbe, l’album offrait des textes épurés et un son original, au carrefour entre rock et musiques traditionnelles. Rejoint par un deuxième opus en 2013 Les camélias de Nantes, l’enregistrement venait frapper les rivages d’une chanson française parfois un peu atone.
C’est ainsi avec un immense plaisir que nous avons découvert en fin d’année le nouvel album de Sylvain GirO Le lac d’Eugénie. Extraites du spectacle éponyme dont le récit a été co-écrit avec Nicolas Bonneau, les dix chansons du disque viennent prolonger le travail réalisé à la suite de résidences. Si l’écriture demeure intime et incisive, ouvrant des champs à la fois personnels et cinématographiques, où chacun peut cheminer, si l’on y retrouve des réminiscences de phrasé breton dans la voix et une poésie portée par un flux sonore toujours aussi magique, c’est véritablement un nouveau voyage qui nous est proposé, passant d’un folk-rock lyrique et intimiste à des chansons champêtres parfois proches de comptines. Sylvain GirO signe l’ensemble des titres, s’associant pour la musique de trois d’entre eux à Erwan Hamon et Tony Hymas. Il a également fait appel à Jean Rochard pour assembler le tout, le label nato (re)produisant artisanalement le disque.
La recherche du temps perdu est peut-être le fil conducteur qui unit ce nouvel opus aux deux premiers. Autour de ce lac d’Eugénie, cette quête se fait pressante. Elle s’incarne à travers un homme qui se perd et se retrouve… Nous nous situons tour à tour en-dehors du temps et en-dedans, le rideau de brume suspendu au-dessus des eaux glacés brouillant les repères de l’espace-temps.
L’étrange et le merveilleux le disputent au réel, charnel et terreux. Les génies d’Eugénie ne sont pas loin. La dramaturgie avance progressivement, entre calme et affolement, sérénité et inquiétude. Il en résulte un conte initiatique aux limites du fantastique, où l’on croise un village fantôme à la Tim Burton, une forêt labyrinthique, un bal endiablé et ce lac enneigé.
Les nuances sont autant d’ambiance assurant une déambulation fluide dans cet univers où les dimensions ne sont plus terrestres. Tout s’enchaîne et s’imbrique…
C’est l’aube. Les harmoniques du violoncelle sont comme les premiers rayons du soleil ; elles nous touchent délicatement et, peu à peu, l’engourdissement de la nuit s’éloigne. Au fur et à mesure que l’astre diffuse sa douce chaleur, la musique se fait de plus en plus intense. L’album s’ouvre comme on s’éveille. « On était place du vieux Palais ». La voix chaude et claire de Sylvain GirO nous inonde de sa force solaire. Le rêve se prolonge : « au droit de la piste aux étoiles (…), je me trouvais devant la toile » ; mais est-ce vraiment un rêve ? Car malgré la douceur des sons, il n’est plus question de quiétude : « je ne sais quelle voix emprunter, route principale ou venelle, battre la sente déjà foulée ou en découvrir de nouvelles ». Superbe !
Dans le titre suivant, La maison désertée, c’est une ambiance plus rock et sombre, annonçant mirages et sortilèges : « j’avance lentement et de chaque côté, c’est à perte de vue l’obscurité (…) ; au loin est-ce un mirage, une fontaine oubliée (…) ; c’est une maison blanche, une maison désertée (…) ; j’ai bien cru voir un souffle, un ennemi qui guettait » ; après avoir vu « l’œil », celui qui « transperce », qui « fauche », « j’avance à pleine bouche, à grandes enjambées, laissant derrière mes pas la maison désertée »… Après cette course, l’homme se retrouve près du lac d’Eugénie. Le silence règne ; seule la ligne de basse annonce l’harmonie. « Pourquoi étais-je seul au monde au bord de sa lac d’Eugénie ? », en poursuivant par de belles allitérations : « je me mêlais à l’onde » (…), « j’attendais que le ciel me sonde ; j’entendais ce son de la nuit » ; « qu’ai-je retrouvé dans ces bois ? Peut-être le cercle que sais-je, peut-être un dessein de mon toit ? » La quête ne s’arrêtera pas là. Dans Le jeune homme, les questions se multiplient : « quel est donc ce jeune homme, d’où vient-il ? Sort du bois comme naît un enfant » ; l’âpreté du violoncelle hachant de son archet ses notes symbolise toute la dureté du monde dans lequel il pénètre ; « il s’agrippe à son beau fusil d’argent », mais ce n’est qu’une illusion. Quand soudain « tapie au loin de son père », apparaît « une fille, une muette (…) son regard est une lame ; je n’ai de saison que l’âme de cet homme aux jambes d’os ». Les questionnements du refrain reviennent ensuite, la parole de Sylvain GirO se perdant au loin, emporté par les tourbillons de la guitare, comme ce jeune homme et ses espoirs. Ce lyrisme laissera place à une Flânerie vélocypédique, courte comptine ontologique sur la roue qui tourne et le temps qui passe, puis à Où es-tu mon enfant ?, chant d’amour du père à son fils, nostalgie d’un temps perdu. L’homme s’aventurera ensuite dans Le carré des indigents, s’allongeant « au long d’une dalle de pierre à l’ombre des cyprès tremblants » ; dans ce « repos des fils de guerre », « chapelle de l’esprit du temps », peut-être l’homme trouvera-t-il cette quiétude à laquelle il aspire tant.
Ce sont ensuite les aiguilles de La gare Saint-Jean, qui rythment une mélodie cinématographique entre au-revoir et adieux, cette gare n’est que « déchirements ». Tandis que la voix (« nous y voilà quoi nous voilà, tu nous y vois là tous les trois, y’a ton frère, y’a toi et puis moi enterrés à faire la guerre »), puis l’accordéon, la batterie, le violon ouvrent un thème plus traditionnel intitulé Fais ta prière. En effet, « tu sauras qu’on ne peut pas arrêter les balles à la guerre ». Or les instruments se dérèglent, se désaccordent, symbolisant le chaos de la guerre. La dernière chanson, La pierre sonnante, révèle la fêlure intime qui a peut-être susciter la quête de cet homme. « Tu es ma brèche, (…), la faille de mon système nerveux ; sans toi je serais un bloc radieux (…) ; à ta vue je me déchire en deux, je m’éloigne, je me perds (…) ; ta lumière me transperce comme la colère de Dieu : j’ai notre amour comme une béance ». L’amour d’Eugénie ?
Sylvain GirO signe ici un album dont l’intensité dramatique n’a d’égal que la beauté mélodique. Venant prolonger le spectacle créé au début de l’année 2014, Le lac d’Eugénie constitue finalement une réflexion sur l’amour et le temps qui passe, le temps béni et le temps perdu. Porté par une voix claire, profonde et virtuose, ce conte fantastique fait largement appel à notre imaginaire et notre sensibilité. Certains évoqueront Jacques Brel ou Jean-Louis Murat, d’autres Gabriel Yacoub ou Gaëtan Roussel ; d’autres encore Noir Désir. Mais c’est avant tout et désormais du GirO. A suivre !

Gérard Viel – Trad Magazine – Février 2015

Le CD reçoit le BRAVO de Trad Magazine :
Un nouveau disque de Sylvain GirO est toujours une bonne surprise. Mais pour son deuxième album solo, Sylvain passe au-dessus de tout ce qu’on pouvait imaginer. Sylvain est un homme de cœur, de passion, de poésie, d’amour des beaux textes, des belles voix et de la bonne musique qui va plus loin que les sentiers battus. A l’écoute de ce disque on comprend mieux sa démarche artistique et son univers qui va du fantastique au rêve éveillé, en passant par la douleur, la tendresse, toujours avec une grande humanité. La voix de Sylvain, qui était dans l’album précédent Le batteur de grève surtout remplie d’émotion, on la retrouve mieux maîtrisée, moins agressive. Elle nous caresse avec des mots simples qui nous vont droit au cœur, avec une énergie et une force qui nous collent au mur. Les arrangements limpides ne font pas qu’accompagner le chanteur. Ils mettent en valeur le texte et la voix. L’ensemble est cohérent et évident. Sylvain est devenu un représentant de la chanson française, avec des influences qui vont du trad’ en passant par le rock, le blues et les musiques du monde. L’ombre de Jim Morrison est perceptible dans cette balade autour du Lac d’Eugénie.